Choisir une distribution Linux n’est pas forcément simple, et dire qu’une distribution est meilleure qu’une autre n’a pas vraiment de sens. Tout dépend du contexte.

Dans la commune ou je travaillais précédemment, nous avions fait le choix de migrer d’abord tous les logiciels d’infrastructure vers des solutions libres (DNS, DHCP, serveur de fichiers, contrôleur de domaine, etc.) avant d’entamer un passage à Linux des postes clients. À Échirolles, nous avons commencé dans un contexte où Microsoft était omniprésent (mais avec une volonté farouche de libérer aussi ces logiciels d’infrastructure).

Le contexte de l’époque (2021)

Nous sommes une collectivité locale. L’immense majorité des nos agents et agentes n’ont pas bénéficié de formation en informatique. Leurs compétences, parfois durement acquises, sont donc limitées. Beaucoup savent exécuter les tâches indispensables à leurs fonctions sans comprendre, et pour cause, les principes sous-jacents.

Dans le service informatique, les gens sont formés à Windows. Certains disposent de certifications et toute l’organisation est basée sur des outils que nous envisageons de remplacer.

Les postes clients tournent tous, à quelques rares exceptions près, avec un système d’exploitation de Microsoft. Au moment où nous commençons à nous interroger, on trouve du Windows 7 (sur les postes les plus anciens), du Windows 10, et quelques Windows 11.

Notre serveur de fichiers, notre DNS, notre DHCP, tournent sur des serveurs Windows. Des stratégies de groupe sont déployées sur les postes clients à partir des habituelles GPO.

L’authentification des postes est assurée par un serveur Active Directory.

Notre messagerie, en revanche, tourne déjà sur un logiciel opensource (BlueMind, à l’époque, SOGo maintenant).

Réflexion préalable

Avant de choisir une distribution, nous nous sommes posés un certain nombre de questions :

  • Pourquoi certaines communes, qui avaient fait le choix d’un passage à Linux, ont connu des retours en arrière lors de changements de majorité ?
  • Dans certaines communes qui évoluent dans un contexte comparables au nôtre, le service informatique affirme qu’un passage au logiciel libre n’est pas possible. Sur quels critères ? Quels sont les points bloquants selon eux ?
  • Existe-t-il une méthodologie de déploiement qui permettrait d’éviter ces écueils ?
  • Des collectivités ou des services publics ont, au contraire, réussi leur passage au libre. Quelles méthodes ont été utilisées ?

Vous trouverez des éléments de réponse dans deux articles sur ce blog :

Choix de la distribution

L’un des enjeux de la migration est la montée en compétence d’une équipe qui n’est pas formée à Linux. C’est une difficulté, bien sûr, mais c’est aussi une opportunité : parce qu’elle connaît parfaitement l’environnement technique et les habitudes prises par les utilisateurs⋅trices, elle est à même d’identifier les obstacles qui risquent de se présenter. Il est donc indispensable de l’inclure pleinement dans le choix du futur système d’exploitation.

Pendant plusieurs mois, toute l’équipe a été encouragée à installer et tester des distributions variées sur des PC de la collectivité, en ayant à l’esprit que l’ergonomie et l’intégration dans notre système d’information étaient des critères essentiels.

Dans un deuxième temps, chacun s’est penché sur les choix des autres. De mémoire Linux Mint, Elementary OS, Pop OS, Manjaro, Debian, Ubuntu et Zorin OS ont été présentés. Et c’est Zorin OS qui a fait l’unanimité.

Les critères mis en avant par l’équipe :

  • la ressemblance avec Windows, avec les mêmes raccourcis-clavier ;
  • la possibilité de lui donner en un clic l’apparence d’une version de Windows ou d’une autre (Zorin Appearance) ;
  • son intégration dans Active Directory dès l’installation ;
  • son design soigné ;
  • le fait que la distribution soit basée sur Ubuntu et Gnome et donc l’assurance qu’une documentation fournie et à jour serait disponible en ligne ;
  • la distribution évoluant en même temps que les versions Ubuntu, la possibilité de bénéficier de noyaux et de pilotes récents ;
  • l’existence de pilotes en français permettant de gérer l’utilisation avancée de nos copieurs et imprimantes (kyodialog, pour les machines Kyocera) ;
  • le magasin d’applications, qui était le plus riche parmi les distributions proposées et qui intégrait parfaitement toutes les méthodes d’installation (Flat, Snap et Ubuntu) ;
  • l’existence d’une version « lite » (basée sur XFCE, pour les PC les plus anciens) et d’une version « éducation ».

On mesure à quel point le choix s’est porté sur l’intégration dans notre environnement plutôt que sur les mérites techniques relatifs de l’une ou l’autre des distributions envisagées.

Déploiement

Avant d’initier l’installation de notre distribution dans un environnement forcément hybride, un gros travail (quasiment terminé aujourd’hui) a été nécessaire : inventaire (GLPI), prise de main à distance (MeshCentral), déploiement d’images (FOG project)… de nombreuses solutions ont dû être installées, paramétrées, testées, etc.

Pendant ce temps, un bêta-test incluant des personnels choisis (et notamment des décideurs), a permis d’identifier et de résoudre un certain nombre de problèmes et de valider concrètement le choix de notre solution.

En septembre 2024, le déploiement a commencé par un appel à volontariat. Les détails de la stratégie de migration sont disponibles à la fin de cet article.

À la date d’écriture de cet article, l’installation dans les écoles de la ville n’a pas commencé. Pour en comprendre les raisons, vous pouvez vous référer à cet article.


Image d’illustration : Zorin OS 17, de Artyom Zorin, sur Wikimedia Commons.
Licence : GPL.

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